Réconciliation, cohésion sociale/Les religieux prennent position

Publié le par jbkouakou

Jean-pierre--kutwa.jpgAbsents de la scène pendant la crise post-électorale, les guides religieux semblent avoir pris conscience de la place qui est la leur dans la reconstruction de la Côte d’Ivoire. A la faveur de trois jours de deuil décrétés par le Chef de l’Etat en mémoire des victimes, deux personnalités et non des moindres de la plate-forme des confessions religieuses ont donné de la voix pour inviter les Ivoiriens au pardon et la réconciliation.

Monseigneur Jean-Pierre Kutwa, Archevêque d’Abidjan confesse : «  Arrêtons de tricher avec nous-mêmes » 

«(…) Les paroles qui me viennent à l’esprit sont  celles du Prophète Jérémie. ‘’Une voix se faire entendre, une plainte amère. C’est Rachelle qui pleure ses fils. Elle ne veut pas être consolée, car ils ne sont plus’’ (Jérémie 31v15). Cette complainte de Rachelle qui pleure ses fils et qui refuse d’être consolée, pourrait être celle de notre Mère-Patrie,  la Côte d’Ivoire qui a vu, à la faveur de la crise post-électorale que nous avons connue, beaucoup de ses filles et fils partir de ce monde. Elle pleure parce qu’ils ont été cruellement arrachés au moment où elle comptait le plus sur eux, pour son relèvement et son développement. Ses fils, ce sont les membres de nos familles, ceux que nous avons particulièrement aimés. Ceux pour qui, parfois nous avons été occasion de faute. Ceux à qui nous devons la vie, ceux à qui nous avons donné la vie. Ses fils, ce sont aussi nos voisins, nos proches, ceux que nous avons connus.  Des religieux, des artistes des hommes politiques, des hommes  célèbres. Ses fils se sont enfin la foule des morts inconnus, des anonymes, les glorieux comme des humiliés,  ceux qui étaient heureux et ceux qui étaient affirmés par la vie. Ceux qui croyaient au ciel et ceux qui n’y croyaient pas. En même temps que nous regrettons ces   morts, nous les recommandons à la Miséricorde du Seigneur. Il est important que nous puissions considérer ces trois jours de deuil national, comme un temps de réflexion profonde qui nous est offert, un temps de mise en examen de conscience devant Dieu. En effet, il est important pour nous aujourd’hui, de savoir nous arrêter pour penser sur nos vies, de réfléchir à nos vies, sur chaque instant de nos vies. Pourquoi vivons-nous ? Comment  nous vivons ? Croyons-nous encore à la vie ? Ces jours de deuil seront utiles, que si nous demandons à Dieu Lui-même de nous mettre sur la route de la réconciliation. Il s’agira pour nous, de ne pas tricher avec nous mêmes et de savoir reconnaître notre péché. Cela exige pour chacun de nous, avec la grâce de Dieu, un changement du regard sur les autres, une véritable conversion des esprits.  La conversion des esprits à laquelle je nous invite tous, commence avant tout par un regard tourné vers Dieu pour Le supplier de nous disposer au pardon réciproque. C’est la conversion des cœurs et la prière qui  conduiront à la nécessaire purification de la mémoire. En ce sens chacun de nous doit rechercher ses propres torts sans chercher ses fautes et se remettre entre les mains de notre unique créateur. La conversion des esprits demande à chacun de nous d’être accueil et écoute des autres. La mémoire de nos morts oblige chacun de nous et c’est  impératif, à accepter de prendre les autres tels qu’ils sont en gardant dans nos cœurs qu’il y a chez eux,  des richesses dont nous ne devons nous priver chacun. Cela passe par le dialogue qui ne sera pas un échange d’idées, mais un échange de dons. Ce dialogue exige un renoncement que seul l’esprit peut garantir dans la prière et nous accorder ainsi la grâce d’une totale et profonde conversion. Le signe de cette conversion c’est que nous prenons impérativement conscience que nous devons aller à la paix. La vraie paix n’est possible qu’avec Dieu. Il n’y a pas de solution à la paix, car la paix elle-même est la solution. La paix n’est pas un équilibre superficiel entre des intérêts matériels divergents. Elle n’est pas non plus à confondre avec la faiblesse, avec la renonciation au droit et la justice équitable avec la prise du risque et du sacrifice,  avec la résignation soumise à la domination d’autrui, dans l’acceptation de son propre esclavage.  Ce n’est pas cela la paix authentique. La répression n’est pas la paix. C’est donc le moment de comprendre qu’il faut arrêter les pillages, les exactions et les violences de toutes sortes qui ne feront que nous éloigner de la paix. Reconnaissons que si la paix nous échappe très souvent, c’est parce que nous n’avons pas le courage d’en prendre le chemin. Ce chemin peut se résumer en trois mots : Amour-Pardon-Justice ».

Imam Idriss Koudou, Président du Conseil National Islamique   (CNI)

« Le pardon, c’est l’arme des forts » 

«  Peuple ivoirien, habitants de la Côte d’Ivoire, ce que nous avons traversé fut un moment très difficile, mais toutes les religions révélées interdisent la vengeance. La vengeance, c’est l’arme de destruction. Le pardon, c’est l’arme de construction. Je voudrais dire au peuple ivoirien, certes, vous avez enduré des douleurs, vos cœurs sont meurtris, mais pour la construction d’une Côte d’Ivoire unie et indivisible, il faudrait que nous nous pardonnions. Le pardon, c’est l’arme des forts. Mais que signifie se pardonner ? Tu as été offensé, et tu te retrouves aujourd’hui en position de force pour te venger. Mais tu abandonnes ce chemin de vengeance. C’est ce qui est demandé au peuple ivoirien pour aider le Président de la République à construire cette Côte d’Ivoire déchirée. Nous devons absolument nous pardonner. Au Président de la République, nous voulons lui demander de pardonner  à tout le monde. Tous les grands messagers ont été victimes de quelque chose et cela est inscrit dans le Coran. Que le Président Alassane Ouattara enseigne à tous les Ivoiriens  le pardon et la patience ».  

Propos recueillis par JERÔME N’DRI

Publié dans SOCIETE

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article